24 avril : Le stage tire à sa fin… Et le voyage en solo est terminé!

25 avril 2013 at 7:30 (Burkina Faso)

Deux grosses semaines de boulot se sont écoulées depuis mon dernier billet.

Durant ce temps, j’ai entre autres : presque achevée ma récolte d’informations terrains pour ma recherche géographique, interviewée la présidente de l’Association des mécaniciennes du Faso (et accessoirement la première femme diplômée en mécanique de moto au pays!) pour un futur article dans Éthiques et Sociétés, mangé quatre nouveaux mets (du fonio, de l’attiéké – des couscous de fonio et de manioc respectivement -, du gonré et du babenga), rencontré un journaliste américain pigiste pour The New York Times, assisté à un conseil d’administration de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec par Skype, couvert une conférence sur le possible référendum de réouverture de la Constitution burkinabè pour prolonger le mandat du président… Où j’ai entendu – et lu – la phrase qui m’a fait le plus rire depuis longtemps : «C’est une façon de montrer au peuple que la démocratie est le pouvoir du peuple par le peuple et pour le peuple selon l’Américain Abraham Licorne»!

Du badenda et des boulettes de gaonré... Très vert, mais pas mal bon!

Du badenda (un plat traditionnel mossi dont le nom signifie «la culotte du chien», composé d’un mélange feuilles de baobab, d’oseille et d’autres plantes vertes locales, d’un peu de riz et de poudre d’arachide, le tout arrosé d’huile, de sel et de piment) et des boulettes de gonré (pâte de haricot bouillie  dans des feuilles)… Très vert, mais pas mal bon!

De la grande visite

Mais surtout, j’ai accueilli de la belle visite à l’aéroport international de Ouagadougou, et j’ai nommé l’Esturgeon laurentien lui-même, Louis. Donc, depuis le 20 au soir, je ne suis plus la Québécoise toute seule à Ouaga, ce qui fait un bien fou! Pour l’instant, l’acclimatation dudit monsieur se fait en douceur, à sa guise et en solitaire, car il me reste encore quelques heures de stage à compléter au journal. Les soirs, nous en profitons pour sortir manger au maquis les mets traditionnels du pays. À date, le poulet télévisé et la carpe braisée passent le test haut la main! Et le concert du Congolais Jupiter dans LE bar  «d’expats» de la ville, le Bar K, aussi. Bon, un peu trop de Brakina a rendu le réveil difficile, mais ça valait la peine!

Juste pour le nom... Et pour les beaux poulets télévisés devant!

Juste pour le nom très montréalais… Et les beaux poulets télévisés devant!

Nous sommes également allés rendre visite à une (grande) famille très attachée à une amie québécoise – et inversement -, avec la mission de prendre des photos, des nouvelles et de remettre un cadeau de sa part. Ça fait plaisir de rendre autant de gens heureux et d’avoir un accès privilégié au quotidien d’une famille Burkinabè plutôt typique.

Portrait de famille : un mari, deux femmes et dix enfants

Portrait de famille : un mari, deux femmes et dix enfants

Votre humble mule avec les deux femmes de la famille, la soeur du mari, une voisine (je crois!)... Et la petite dernière!

Votre humble mule avec les deux femmes de la famille, la soeur du mari, une voisine (je crois!)… Et la petite dernière!

;-p

;-p

Le commerce du père de famille, la vente de charbon de bois à 6 000 FCFA (12$) le sac

Le commerce du père de famille, la vente de charbon de bois à 6 000 FCFA (12$) le sac

Je redeviens simple touriste… direction la brousse de Ouahigouya!

Changement total de rythme de vie : dès ce vendredi, c’est le vrai tourisme qui commence. Au programme d’abord : une fin de semaine à Ouahigouya, où je retrouverai mes collègues de Radio Wend Panga et où nous devrions aller découvrir pas un, mais deux vrais villages burkinabè, à 30 km de la ville, dans le Sahel.

Une location de moto est prévue, et j’en connais un qui a hâte de conduire! Un peu moins hâte de me traîner comme passagère, cependant, mais il n’a pas vraiment le choix, je n’irais pas à pied et je ne conduis pas… Pour l’instant du moins, parce que mon séjour m’aura convaincue de «passer» mon permis au retour. Mais ça, c’est une autre histoire!

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5 avril : Petite incursion dans le monde de la recherche universitaire – et des déguerpis urbains

14 avril 2013 at 10:54 (Burkina Faso)

Ces derniers jours, j’ai un peu quitté le journalisme pour me (re)transformer en étudiante. C’est que, depuis 2010, je complète à temps (très) partiel un certificat en géographie internationale. Mon séjour au Burkina Faso est une occasion en or pour réaliser ma toute première recherche terrain dans le domaine.

Me voilà donc à troquer mon chapeau de reporter pour celui de chercheure en sciences sociales, et à présenter ma « lettre de créance » de l’UQAM pour assurer à mes interlocuteurs que mon Étude sur les conséquences de la relocalisation des habitants des quartiers Zangouettin, Tiedpalogo, Peuloghin et Koulouba de Ouagadougou (Burkina Faso) dans le cadre du projet ZACA n’est pas bidon, ni destinée à être publiée dans un journal.

« Dans les faits, que signifie donc ce titre à rallonge? » me direz-vous. Pour faire une histoire courte, le projet ZACA (Zone d’Aménagement Commerciale et Administrative) a été lancé en novembre 2000 par l’État burkinabé dans le but de revitaliser le centre-ville historique de Ouagadougou et de le rendre plus compétitif à l’international. Pour permettre l‘aménagement d’espaces commerciaux et administratifs, en plus d’un hôtel cinq étoiles et un grand centre culturel multifonctionnel, l’État a fait raser à partir de novembre 2003 environ 85 hectares de vieux quartiers construits avec les moyens du bord, sans plan d’urbanisme et manquants de plusieurs infrastructures de base. À l’avenir, il n’y aura plus aucun immeuble résidentiel dans la ZACA, même si ce mot veux dire « maison » en mooré.

Une vue modélisée de ce que à quoi doit finir par ressembler la ZACA, selon le consortium d'urbanisme G2 Conception.

Une vue modélisée de ce à quoi devrait ressembler une partie de la ZACA en 2014, selon les plans du consortium d’urbanisme G2 Conception

Pour l'heure, ça ressemble à ça!

Pour le moment (février 2013), ça ressemble plus à ça!

Les chantiers en cours sont malgré tout nombreux, les immeubles terminés plutôt rares...

Les chantiers en cours sont malgré tout nombreux, mais les immeubles terminés très rares.

Le projet de l’État a obligé les habitants de plus de 1 500 parcelles à déménager rapidement sur deux « trames d’accueil » situées à plusieurs kilomètres du centre-ville et dont l’aménagement de base (aqueduc, électricité, routes, écoles, etc.) restait à faire. Ceux que l’on nomme les « déguerpis » ou les « déplacés » de ZACA sont maintenant installés depuis une dizaine d’années dans leurs nouveaux quartiers et dans leurs nouvelles maisons construites selon un ensemble de règles d’urbanisme (un « cahier de charges ») très strictes.

L’objectif principal de ma recherche est de savoir si leur relocalisation a eu les impacts positifs avancés par l’État sur leur qualité de vie. Je me suis donc rendue à la trame d’accueil de Ouaga 2000 rencontrer quelques déplacés et discuter de leur quotidien. Je ne peux reproduire ici ni leurs propos ni leurs photos, car je l’ai promis, mais je peux résumer leur situation dans mes mots : le quartier jouit d’un meilleur bâti, de conditions générales plus salubres, d’infrastructures urbaines plus efficaces et d’une meilleure sécurité… Mais les gens peinent à retrouver leur niveau de vie et à terminer la construction intérieure de leur maison, car ils n’ont plus de travail.

Il faut savoir que la plupart des déplacés sont de petits commerçants informels (tailleurs, coiffeuses, restauratrices, mécaniciens, vendeurs d’aliments, d’eau, de jus ou de minutes téléphoniques) qui, une fois éloignés du centre-ville, perdent beaucoup de clients et de possibilités d’affaires. En plus, selon le cahier de charge initial, le commerce informel est totalement interdit à la trame d’accueil, ce qui force ses habitants à se déplacer à plusieurs kilomètres de chez eux pour exercer leur activité commerciale (l’autobus ne les dessert que depuis 2008, et encore pas beaucoup!, et plusieurs n’ont pas les moyens de posséder et de faire rouler une moto). Le gouvernement a fini par fermer les yeux sur cette règle il y a un an ou deux, mais le mal est fait…

Et bien sûr, qui dit pas de travail dit pas de moyens pour installer l’eau courante, et encore moins l’électricité, prolongeant la spirale de l’impossibilité de démarrer son petit commerce-maison si ce dernier nécessite un frigo, un congélateur ou une simple lampe!

La trame d’accueil est donc devenue le royaume de la débrouille, avec de petits commerces qui poussent mais qui peinent à survivre, les autres résidents n’ayant pas vraiment les moyens d’y consommer. Malgré tout, certains commencent à améliorer leur ordinaire, et à se dire que ça va finir par fonctionner, car le centre-ville va se déplacer dans leur secteur d’ici quelques années (les ministères et les grandes entreprises se reconstruisent les uns après les autres dans le chic quartier voisin de Ouaga 2000). D’autres refusent d’adapter leurs ambitions au nouveau contexte et restent chez eux à accabler le gouvernement et à rêver de refaire exactement ce qu’ils faisaient avant, mais qui n’est plus du tout possible à la trame…

Au sortir d’une journée à recueillir leurs témoignages, j’étais plutôt pessimiste, et accablée par tant de misère… Voir une fillette de 11 ans faire ce qui ressemble à une crise d’épilepsie sur le sol en terre devant soi « parce que ses parents n’ont pas les 13 000 francs CFA (26$ CAN) par mois pour payer son médicament », ça vient te toucher au coeur et ça fait très mal!

La cours commune d'une famille de déplacés à la trame d'accueil de Ouaga 2000.

La cour commune d’une famille de déplacés à la trame d’accueil de Ouaga 2000

Ironie du jour : ce terrain collectif en terre battu porte le nom «d'espace vert»!

Ironie : ce terrain collectif en terre battue porte le nom « d’espace vert »!

L'une des deux bornes-fontaines du quartier, pour les nombreux résidents qui n'ont pas l'eau courante dans leur cours... et encore moins dans leur maison!

L’une des deux bornes-fontaines du quartier, pour les nombreux résidents qui n’ont pas l’eau courante dans leur cour… et encore moins dans leur maison!

La spéculation des terrains à fait que des gens fortunés sont venus acheter des terrains à la trame pour se construire de grosses maisons... Et ne consomment rien dans le quartier, évidemment!

La spéculation sur les terrains a fait que des gens fortunés sont venus acheter des parcelles à la trame pour se construire de grosses maisons… Et ils ne consomment rien dans le quartier, évidemment!

La preuve que la trame d'accueil est loin du centre-ville : aux limites du quartier, la brousse.

La preuve que la trame d’accueil est loin du centre-ville : aux limites du quartier, la brousse.

Le second volet de ma recherche concerne l’aménagement de la ZACA elle-même. Car, si les travaux sont censés se terminer en 2014, dans les faits, il y a encore de grands terrains vagues au centre-ville, et des chantiers qui semblent abandonnés. Quoi de plus frustrant pour les déplacés, qui se disent qu’ils auraient bien pu y rester quelques années de plus!

Cet axe routier tout neuf aura le temps de vieillir - et l'herbe de pousser entre les pavés- avant d'être entouré de bâtiments.

Cet axe routier tout neuf aura le temps de vieillir – et l’herbe de pousser entre les pavés – avant d’être entouré de bâtiments. (Remarquez le troupeau de chèvres qui traverse le centre-ville!)

Un des chantiers de ZACA, l'Hôtel administratif du Centre, c'est-à-dire des tours à bureaux de fonctionnaires.

Un des chantiers actifs de ZACA, l’Hôtel administratif du Centre, c’est-à-dire de futures tours à bureaux pour les fonctionnaires.

Une preuve que ça avance, tranquillement... Des pavés en attendre d'être posés.

Une preuve que ça avance, tranquillement… Des pavés en attente d’être posés.

J’avoue que je n’avais pas grand espoir de voir un responsable du projet répondre à mes questions – l’État burkinabè n’est ni très communicatif ni très transparent, après tout! – mais c’était sans compter sur ma bonne étoile. Il se trouve que le frère de mon chef de reportages au Pays est le directeur de la communication du ministère de l’Habitat et de l’Urbanisme… Qui m’a offert toute l’aide possible, merci aux sacro-saintes relations familiales africaines! J’ai donc pu solliciter une rencontre avec le directeur général du projet, qui n’a eu d’autres choix que d’accepter. Je ne peux rapporter ses propos ici, parce que j’ai promis qu’ils seraient retranscrits uniquement dans ma recherche, mais je peux dire que j’ai recueilli du croustillant… Mes réflexes de journaliste habituée à soutirer les « vraies » réponses aux gens redevables au public m’ont bien servi!

Tout ça pour dire que cette recherche m’a fait réaliser sans l’ombre d’un doute que je suis beaucoup plus à l’aise dans mon rôle de journaliste que dans celui de chercheure en sciences humaines. Entrer chez des gens qui n’ont rien demandé et leur faire raconter leur vie pour le seul « avancement » de la discipline géographique me met hautement mal à l’aise, alors que remettre le nez d’un directeur de projet d‘État dans ses propres contradictions me procure une très grande satisfaction… Satisfaction beaucoup moins grande que d’habitude, cependant, parce que je ne peux rendre publics ses propos, et que cette interdiction ôte selon moi une grande part de légitimité à mon travail.

Le bon côté, par contre, c‘est que cela m’a permis de m’imprégner quelque peu de la vie des Ougalais d’un quartier très populaire, et d’en savoir plus sur leur quotidien. Un apprentissage qui servira ma réflexion bien au-delà du cadre scolaire!

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Le retour du flâneur

7 avril 2013 at 11:19 (Castor canadensis)

« Le retour du flâneur » : cette chanson du groupe québécois Beau Dommage a été adoptée comme hymne par votre gnou favori.

« Je suis revenu dans le quartier,
Revenu pour y rester…
C’est le retour du flâneur
Après un long détour. »

Beau Dommage, Le retour du flâneur (1994)

Comment ne pas croire que ce refrain n’a pas été écrit en pensant à la migration des gnous? S’il y a un être vivant dont la spécialité est les longs détours, c’est bien lui! Parlant de détours, la dernière intervention du gnours polaire sur ce site remonte à plus d’un mois. Je vous entends vous demander : « Mais qu’a-t-il fait durant tout ce temps ? »

Eh bien, durant tout ce temps, il a tenté de résoudre son quasi insoluble problème, à savoir : quelle nourriture choisir? Rappelons que votre gnours polaire est né de la combinaison d’un herbivore et d’un carnivore, ce qui en fait d’office un mangeur de viande végétarien. Cruel dilemme!

Lors de sa dernière intervention, ledit gnours était à la recherche d’Ouragan, le personnage vedette d’une émission de Radio-Canada qu’un internaute décrit ainsi : « Au début de l’émission, on voyait le personnage principal, Ouragan (interprété par Lionel Villeneuve), qui se battait avec un ours noir. Il y avait un gros plan où on le voyait ramasser une grosse pierre et il tuait l’ours avec cette pierre. Tout un héro(sic)! ».

Vous aurez sans doute tous (???) compris qu’il recherchait « Ours-à-gants » pour lui demander comment, le gnours polaire pourrait en devenir un lui aussi, car le froid, peu répandu dans sa contrée natale, l’empêchait de réfléchir. Il se proposait aussi, s’il ne pouvait percer cet insaisissable secret, de supprimer cet ours pour lui voler ces fameux gants…

Le mythique Ours-à-gants...

Le mythique Ours-à-gants (merci Google Images!)

Après quelques semaines de vaines recherches ardues, il doit maintenant se résoudre à abandonner sa quête qui s’apparente à la lutte de Don Quichotte contre les moulins à vent car, même Internet n’avait qu’un ténu souvenir de cet Ouragan (voir plus haut)! 

Toutefois, cet abandon est d’autant moins dramatique qu’il commence à faire beaucoup plus chaud au pays de Jordin Tootoo, éminent (?) joueur de hockey né à Churchill, au Manitoba, la capitale mondiale des ours polaires. Vous noterez en passant que M. Tootoo  porte des gants, comme il sied à tout être vivant qui a grandi au Nunavut!

Même si son chandail affiche un titre à dents de sable, Jordin Tootoo a vécu au royaume des ours polaire!

Même si son chandail affichait un tigre à dents de sabre, Jordin Tootoo a bien vécu au royaume des ours polaire!

Quoi qu’il en soit, le problème de nourriture n’ayant pas encore été résolu, le gnours est d’une maigreur affolante qui se situe entre les deux extrêmes suivants :

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Un gnou au sommet de sa forme (Merci Flick!)

et

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Un gnou dont la date d’expiration est passée (merci Flick!)

Cela oblige donc ledit gnours polaire à aborder de front son principal problème : « Qu’est-ce qu’on mange? » À titre de bête mythique un peu timbrée, il peut se permettre de reprendre ses recherches sur Internet à l’aide son SGA personnel, SGA ne signifiant pas Satellite Géostationnaire Anik, utilisé couramment pour fournir l’accès Internet en Arctique, mais bien «Système Gnoutique Adapté», à savoir un vulgaire téléphone intelligent implanté dans les cornes du gnou… Comme quoi le téléphone peut être plus intelligent que son propriétaire!

À la fameuse question du mois, voici la première réponse qu’il trouve :

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Le gnou trouvera-t-il à se sustenter?

Il s’agit d’un livre publié par les Cercles des Fermières du Québec. Cette réponse ne lui est d’aucune aide, car, il ne peut comprendre en quoi des recettes de « Boules aux figues et au chocolat » ou encore de « Côtelettes de porc glacées au sirop d’érable » peuvent lui être d’un secours quelconque.

Comme dans le cas de l’« Ours-à-gants » et de Don Quichotte, il doit donc poursuivre sa quête. Nous saurons la prochaine fois où cette dernière l’a mené… À l’église, endroit réputé pour ses quêtes et ses miracles? Chez Jean Coutu*, où l’« on trouve de tout, même un ami » et qui sait, un autre gnours? Ou encore chez Mondou*, fournisseur de nourriture pour les animaux et de câlins*, dont le gnours a aussi besoin, compte tenu de son apparence défraîchie?

(*) : Le nom de ces entreprises et/ou de leurs produits n’apparaissent ici qu’en raison de leurs publicités relativement connues au Québec, publicités qui s’intègrent très bien à l’univers du gnours polaire, qui actuellement « N’en veut pas une froide! », parole de Coors Light*, mais qui apprécierait bien « Le lait qui réchauffe le cœur »*.

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24-26 mars : Petite immersion québécoise à Dédougou

3 avril 2013 at 7:24 (Burkina Faso)

Décidément, après être restée sans sortir de Ouaga pendant près de deux mois, j’ai la bougeotte! Moins de 24 heures après être rentrée de Ouahigouya avec mon vélo, mon linge sale et mon 15 kg de patates, j’étais assise dans un autobus mauve de la Compagnie Sahélienne de Transport et de Représentation (CSTR) en direction de Dédougou, une ville de la Boucle du Mouhoun, du nom d’une rivière (nommée Volta Noire du temps de la Haute-Volta pré-révolutionnaire*) qui passe par là. Et entre-temps, j’ai eu le temps de laver mes habits à la main dans la cour, de regarder les Étalons planter le Mena du Niger 4-0 avec mes voisins en buvant du thé et de participer à la réunion de rédaction du dimanche matin au journal. Efficace la fille, n’est-ce pas?

La route!

La route parcourue

Un des anciens noms de la ville de Dédougou est Dèèdu, soit «je suis heureux» en langue bwamu. Après quatre heures de bus non climatisé qui roule dans la poussière sur une route pas encore goudronnée au complet, j’étais en effet bien heureuse de retrouver un petit contingent de personnes qui, même si je ne les connaissais pas personnellement, me semblaient d’avance plus familières que toutes les autres croisées jusque qu’alors. Et pour cause : des représentants de l’Union des producteurs agricoles du Québec – Développement international (UPA DI), de l’Oeuvre Léger et du journal agricole La Terre de chez nous. Et le lendemain, l’ambassadeur du Canada en personne s’est déplacé!

Car j’étais à Dédougou pour couvrir les célébrations des 20 ans d’existence de l’Union des Groupements pour la Commercialisation des Produits Agricoles de la Boucle du Mouhoun, une organisation créée en partie sous l’impulsion de l’UPA DI et subventionnée durant ses 10 premières années par l’Agence canadienne de développement international (ACDI), qui appuie aujourd’hui financièrement un nouveau projet de résilience aux changements climatiques. L’occasion m’avait été fournie par une amie, dont la mère travaille à l’UPA… Merci Sophie, quel bonheur de ressortir son accent et ses expressions québécoises des boules à mites! Et un petit séjour à l’hôtel climatisé, ça se prend bien aussi!

À l'UGCPA/BM, chaque surplus de céréale à commercialiser est ensaché avec toutes les informations sur le producteur, puis entreposé dans les magasins-entrepôts commun.

À l’UGCPA/BM, chaque surplus de céréales à commercialiser est ensaché avec toutes les informations sur le producteur, puis entreposé dans les magasins-entrepôts communs en attendant sa vente.

Donc, j’ai assisté à ladite cérémonie de commémoration des 20 ans de l’UGCPA/BM (si vous aviez à quel point ils aiment les acronymes ici, c’est à en perdre son mooré!), où, juste pour me mélanger, le français était traduit en… dioula. Il faut dire que Dédougou est à la frontière avec le pays Bobo, où l’on parle le dioula, la seconde langue la plus parlée au Burkina. Mon article en ligne ici. Et voici quelques photos qui elles, se passent de traduction!

Ouitien Dembele, un des artistes-agricultueurs de la région qui a égayé la cérémonie.

Ouitien Dembele, un des artistes-agriculteurs de la région qui a égayé la cérémonie.

Un autre des costumes traditionnels de Ouitien Dembele.

Un autre des costumes traditionnels de Ouitien Dembele.

Une troupe de danse traditionnelle locale qui a participé à quelques festivals internationaux.

Une troupe de danse traditionnelle locale qui a participé à quelques festivals internationaux.

Le secrétaire général de l'UPA DI, André Beaudoin, a remis un bâton de la parole au président de l'UGCPA\BM. La pièce a été réalisée expressément pour l'occasion par une artisane huronne-wendat de Wendake, près de Québec.

Le secrétaire général de l’UPA DI, André Beaudoin, a remis un bâton de la parole au président de l’UGCPA\BM, Bonzi Nonyèza. La pièce a été réalisée expressément pour l’occasion par une artisane huronne-wendat de Wendake, près de Québec.

L'ambassadeur canadien au Burkina, Ivan Roberts, n'a pu s'empêcher d'évoquer avec regret la disparition prochaine de l'ACDI, où il a travaillé durant 22 ans.

L’ambassadeur canadien au Burkina, Ivan Roberts, n’a pu s’empêcher d’évoquer avec regret la disparition prochaine de l’ACDI, où il a travaillé durant 22 ans.

Aux invités de marque, dont l'ambassadeur, on a remis un bouc soigneusement identifié!

Aux invités de marque, dont l’ambassadeur, on a remis un bouc soigneusement identifié!

Le soir, j’ai mangé au maquis avec le Québécois installé à demeure à Dédougou pour l’UPA DI et le journaliste de La Terre de chez nous, qui en était à sa première visite en Afrique. Discussions intéressantes!

Le lendemain, j’ai eu la chance de visite une productrice agricole au parcours atypique, qui comprend la possession personnelle d’une partie de ses terres et un prêt pour doubler (et plus!) son cheptel de bétail. Impressionnant! Il faut savoir que la Boucle du Mouhoun est considérée comme «le grenier du Burkina» et que les céréales y poussent très bien. Le bissap – ou fleur d’hibiscus – avec lequel on fait mon jus préféré, aussi.

Madame Kafando, une productrice pionnière de la Boucle du Mouhoun, et une partie de son troupeau

Madame Kafando, une productrice pionnière de la Boucle du Mouhoun, et une partie de son troupeau

Une belle mule de Dédougou!

Une belle mule de Dédougou!

Suzanne Traoré, présidente de la section bissap de L'UGCPA/BM et une partie de la récolte... Le bissap est le nom ouest-africain donné à la fleur d'hibiscus.

Suzanne Traoré, présidente de la section bissap de l’UGCPA/BM et une partie de la récolte… Le bissap est le nom ouest-africain donné à la fleur d’hibiscus. (Elle porte le pagne traditionnel tressé, dont j’ai reçu un exemplaire – orné de motifs de poissons – à Ouahigouya)

Ensuite, après quelques heures d’une assemblée générale bilingue dioula/français centrée sur la question des assurances agricoles et un dîner collectif, j’ai eu la chance de reprendre la route de Ouaga en «pick-up» (on dit «bâché», ici) tout neuf… Merci UPA DI! Le trajet de retour a donc été plus court, plus climatisé et surtout rendu plus agréable par la discussion sur tout et rien en Afrique… Avec des Québécois! Les liens avec la maison, c’est parfois peu de choses, mais ça rassure et ça requinque!

Selon les bonnes habitudes apprises à Ouahigouya, j’ai ramené des produits de la région dans mon sac à dos. Cette fois, quatre sachets d’un délicieux yogourt et une petite meule de tomme au lait de vache artisanal faits par des sœurs de la place. Miam! Manquait juste le gâteau au fromage (décidément, l’absence de dessert m’affecte plus que je le croyais!)!

Mauvaise photo, mais très bon fromage!

Mauvaise photo, mais très bon fromage!

Finalement, le dernier jour de son passage au Burkina, j’ai accompagné mon collègue journaliste dans la ville, lui racontant ce que j’en savais… Et prenant quelques photos comme une vraie touriste, pour une fois! La parenthèse québécoise s’est terminée devant une pizza aux anchois. Le lendemain, leur avion parti, c’était retour au riz gras!

On transporte de tout sur un vélo... Et on circule sans problème sur l'autoroute!

On transporte de tout sur un vélo… Et on circule sans problème sur l’autoroute!

Les barrages de Ouaga abritent aussi des jardins, moins prospères que ceux de Goinré.

Les barrages de Ouaga abritent aussi des jardins, moins prospères que ceux de Goinré.

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Le rond-point des Martyrs, sur la route de la Présidence du Faso à Ouaga 2000. Les monuments qui décorent les ronds-points de la ville sont tous un peu particuliers…

* Petit cours rapide d’histoire-géo du Burkina Faso depuis 1900

Après avoir fait partie de la Fédération de l’Afrique orientale française jusqu’en 1919, le territoire devient la colonie de Haute-Volta, ainsi nommée parce qu’elle abrite le bassin du fleuve Volta, qui se rend jusque dans le golfe de Guinée, et dont les trois plus grands affluents sont la Volta Noire (aujourd’hui le Mouhoun), la Volta Rouge (le Nazinon) et la Volta Blanche (le Nakambé). En 1932, la colonie est supprimée et partagée entre le Niger, le Soudan français et la Côte d’Ivoire. Puis, en 1947, une loi rétablit la Haute-Volta dans son territoire de 1919 et la colonie reprend son nom, qu’elle gardera à son indépendance, le 5 août 1960.

Le pays prendra son nom actuel de Burkina Faso (Burkina signifie «intègre» en mooré et Faso, «terre des pères, mère patrie» en en dioula, les deux langues majoritaires du pays, donc «le pays des hommes intègres») le 4 août 1984, sous la présidence du révolutionnaire marxiste-léniniste Thomas Sankara, arrivé au pouvoir par coup d’État le 4 août 1983. Sankara a changé la face du pays dans une foule de domaines (logement, éducation, transport, politique, etc.) durant 4 ans, avant d’être assassiné dans des circonstances nébuleuses le 15 octobre 1987. Selon la rumeur populaire, Blaise Compaoré, l’actuel président du Burkina – en poste depuis 1987 – et fidèle ami de Tom Sankara, comme on dit ici, aurait quelque chose à voir dans cette histoire…

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